Très beau livre sur l’histoire du Rwanda et ses séismes politiques du siècle à travers l’histoire de femmes et de ces hommes Tutsis meurtris par l’histoire de ce pays.

A travers l’histoire d’une femme mariée à un Français et à l’arrivée d’un enfant dont la tète est ouverte un monde s’ouvre à son propre enfant naturel.

De mensonges en non-dits Milan va à travers son enfance et surtout son adolescence découvrir le Rwanda à travers Claude, qui débarque un beau matin en France et repart aussitôt, et à travers un voyage prophétique avec sa mère dans ce pays inconnu de lui.

Non-dits d’une mère traumatisée qui tait son histoire à son propre enfant jusqu’à sa mort. Une tombe comme diraient les jeunes. Même lors de son voyage en terre natale rien ne sortira de sa bouche ni de celle de sa propre mère.

Milan lui, après avoir passé une licence de droit et avoir travaillé quelque temps, part au Rwanda en quête de sa vie. Il y restera dix ans à se chercher et trouver ses racines.

Dix ans à découvrir les crises de ce pays à travers des amis : Claude son oncle, Rosalie et Stella, Eusébie la mère de Stella, mamie la grand-mère du protagoniste, Alfred qui passe sont temps à se battre au Congo et bien d’autres aux vies perturbées.

Et surtout cet arbre le Jacaranda qui détient tant de souvenirs et de morts à ses racines et que Stella prend pour son confident et comprend que cet arbre détient une vérité qui lui est caché. Elle y passe sa vie dans les branches à toucher son écorce et l’enserrer dans es bras. Jacaranda qui se coupé par Eusébie sa mère pour faire construire une maison à louer.

Stella dernière enfant d’Eusébie qui se doit d’être parfaite, éduquée et devant taire son origine et les souffrances de sa mère. Mais qui au bout du compte explose et finit dans un hôpital psychiatrique quand sa mère révèle l’histoire de sa vie et les atrocités par lesquelles elle est passée.

Milan qui va découvrir à travers Rosalie l’arrière-grand-mère de Stella toute l’histoire du Rwanda en partant des rois de ce pays, roi détrôné par les Belges, prenant la fuite pour l’Ouganda, recréant un semblant de vie avec toujours l’inquiétude du retour au pays, des soubresauts et des meurtres qui parsèment l’histoire du Rwanda. Rosalie qui va apprendre à ses enfants, petits-enfants ce qu’était le Rwanda royal et qui influencera ses enfants pour un retour au pays.

Retour tragique puisque tous vont mourir sauf Eusébie qui perdra son mari et ses quatre enfants et finira par enfanter une fille à la veille de ses quarante ans comme pour se redonner une force et oublier les atrocités vécues. Enfant qu’elle veut forte mais qui en son for intérieur sent que son histoire est lourde de sang et de sens.

La vie des uns et des autres s’entremêlent : les uns massacrés par les Hutus, les autres fauteurs de morts et de sang dont la terre est rouge.

On découvre les tueries, le génocide à travers ses vies, leurs paroles et les récits de quatre générations.

Et puis ce besoin d’expier du gouvernement qui convie de manière régulière les Tutsis à témoigner – ne pas oublier pour avancer et se rappeler que cela a existé ! Essai pour pardonner ce qui est impardonnable et qui brise des vies.

Et la paix qui émerge du lac Kivu où Milan, Stella, Claude et Alfred se réfugient. Milan finit par apprendre l’histoire de sa mère, voulant échapper au génocide, en traversant le lac Kivu pour se réfugier au Burundi, a emporté sa sœur qui ne savait pas nager dans le lac et qui porte cette culpabilité et ce silence éternel.

Dix ans pour comprendre tout ce poids après la mort de cette dernière qui a emporté son histoire. Mais Eusébie expliquera tout.

Très beau livre qui retrace cette histoire d’une sauvagerie incommensurable. Il est écrit magnifiquement et sans pathos. Ces vies qui essaient de se reconstituer, de recoller les morceaux et de se pacifier tout en gardant de par derrière ces atrocités.

Ce livre a fait écho à ce voyage réalisé à travers le Rwanda il y a quelques années et je revois encore le lac Kivu comme une merveille.

Très émouvant.

Il a obtenu le prix Renaudot.

Pairs le 8 décembre 2024.