Puis à nouveau la route pour rejoindre Reykjavik. Juste au-dessus du 64ème parallèle, Reykjavik est la capitale la plus septentrionale du monde. Son nom, qui lui va à ravir, signifie la « baie fumante ». La ville fut baptisée ainsi par le premier colon, Ingolfur Arnarson, à la vue des vapeurs s’échappant des sources chaudes. Sur la route on est à nouveau cette barre blanche, sommet de montagne aplati par le vent et l’érosion, blanc de poudreuse tombée cette nuit-là. Un paysage toujours bleuté et enveloppé de ouate. Un paysage où l’on ne distingue que le blanc de la neige et parfois les sommets. La route se fait difficile, une seule voie disponible pour deux sens et comme elle est glissante, on serre les fesses en se disant que cela serait bête de finir dans le fossé un 1er janvier !
Enfin la capitale s’ouvre devant nous, nuitée, illuminée, avec en face un nouveau sommet. Tout est blanc. La mer vient lécher les côtes enneigées. Tout est doux, ouatinée et les bruits se font sourds. On se dirait au milieu de nulle part et pourtant la baie de Reykjavik est bien sous nos yeux. Qu’elle est longue et étirée, entre ce blanc laiteux et le gris acier de l’océan et le ciel parsemé de nuages. Les rochers de la baie sont comme des grosses boules de neige qui tendent leurs doigts gelés vers la mer et le ciel. Un décor de sapin de Noël gelé ! Comme un rempart protégeant des envahisseurs avec en fond de toile le rose du soleil qui se lève et s’étire. Les nuages font une danse comme des oiseaux qui veulent se bécoter. Une nature hostile ! On ne peut mieux faire pour vous dire de rester au lit bien au chaud sous la couette ! Tout au bout de la baie, en sens inverse de l’Opéra, se tient la maison blanche Hofdï où Gorbatchev et Reagan se sont retrouvés en 1986 pour signer le traité de dénucléarisation il me semble. Cette maison est la représentation de la fin de la guerre froide. Cette maison est isolée et toujours pleine d’histoire. Elle est isolée au bout de la baie et nul ne vient la déranger. Mais elle a une histoire puisqu’elle a été construite en 1909 par le consul français, Jean-Paul Brillouin et est devenue la résidence du poète et homme d’affaires Einar Benediktsson (1864-1940). Elle mérite le détour même si on ne peut la visiter.
Puis on part à la découverte de cette ville enneigée, blanche et grise, hostile aux marcheurs bien habillés. Car il faut du courage pour arpenter la baie de Reykjavik entre les morsures du vent, la glace qui fait patiner et la neige dans laquelle on s’enfonce ! Seule la vue Le Voyageur du Soleil, en islandais Sólfar, sculpture située à Reykjavik, sur le bord de l’ancien port de la ville. Elle est réalisée en 1990 par Jón Gunnar Árnasonsur et je l’ai surnommée la barque des Vikings qui renvoie à l’histoire du pays et rappelle la dureté de la vie en cette contrée. Ce bateau en acier s’élance vers la mer à l’assaut de la vie peu colorée. Cette sculpture en acier évoque la silhouette d’un bateau viking qui se dirige vers le soleil quand celui-ci se couche. En face l’Opéra, nommé Harpa, tout de vitres vert bouteille se reflétant dans la neige et dans la mer, bouche la vue vers le vieux port maritime. Un autre bâtiment étrange en forme de fusée s’élève en plein centre de Reykjavik, – c’est l’église luthérienne de Hallgrímskirkja. Construite de 1945 à 1986, elle est en béton et sa flèche mesure 74,5 m. Elle a été le plus haut bâtiment d’Islande. On peut l’admirer de partout. Et puis une chose remarquable dans la ville ce sont les murs peints. On retrouve l’art-street qui agrémente de couleurs la ville par endroits.
Et puis à nouveau la nuit refait surface pour vous glacer un peu plus. Flâner dans les rues pour lécher les vitrines est un calvaire. Trop froid, trop venté, trop glacé et en prime le sol glacé fait patiner … Une seule envie – rentrer à l’hôtel ou bien filer au Blue Lagoon pour aller nager dans les eaux chaudes du lac. Enfiler son maillot de bain et plonger dans l’eau chaude pleine de sédiment, chargée de silice en suspension qui lui donne cette couleur incroyablement bleue, se tartiner la face pour devenir toute bleue grise, tout en nettoyant et adoucissant sa peau. Glisser dans les eaux d’un bleu incroyable, perdue au milieu des champs de lave, plus ou moins chaudes au gré de ses pérégrinations dans le lac, boire une glace bleutée à en avoir la langue bleue et continuer son périple sans ses eaux chaudes et fumantes. Eau à 40°C enveloppée d’un nuage de vapeur du Blue Lagoon. Un vrai délassement en plein air et au grand air bien frais et revigorant islandais ! On ne peut imaginer cet endroit même au détour d’un virage tant il est bien caché derrière des monts de lave.
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