Le lendemain, soleil de plomb, pour un départ en bateau vers une remontée de 200 kms du lac vers le nord pour atteindre une autre station météorologique, Solnitchnaïa.
Au revoir Ozouri et sa baie ! Mais avant le départ un troupeau de vaches viendra boire au bord de la baie. On dirait un rappel de l’Inde avec les vaches sacrées ! A chaque pays traversé, j’ai droit à ce type de clin d’œil, de rituel, et je m’en amuse à chaque fois. Elles se désaltèrent à l’eau fraiche et transparente et se purifient dans le Baïkal. Véritable bénédiction pour des vaches sacrées russes ! Et elles repartent brouter ailleurs, comme une apparition de mon imagination. Om Mani Padme Um !
Emerveillement du départ et de la découverte de l’immensité de la mer – le lac est calme. Nous allons longer la côte est de l’ile d’Olkhon puis ouest du lac avec ses roches blanches, grises et marron, ses pics et ressacs. Elles sont striées, comme peignées, de manière horizontale et verticale. Elles sont minérales, calcaires et tombent à pic dans l’eau. On dirait comme au Ladakh, que la Terre est passée dans une grande essoreuse qui a tout retourné et mis tout à l’envers ! L’érosion joue énormément. Les saisons font que les roches tombent et s’effritent, laissant un paysage impressionnant, minéral, compressé et griffé, en forme de vagues, zébrées, peintes avec parfois quelques sapins désespérément accrochés, simple survivants, de ces mouvements tectoniques. Parfois quelques plages font surface le long des immenses roches. Un beau sable blond se jette dans la grande mer. Mais le plus souvent on a affaire à des galets.
On quitte alors l’ile d’Olkhon, que l’on laisse derrière soi, pour foncer vers la grande mer en passant par le cap Khoboï et enfin sentir l’immensité du lac Baïkal. Et là l’excitation est à son comble. Le bateau, tel un cheval fou, vogue et saute sur les vagues. Nous voilà à l’assaut du lac. Hourra ! Mon maitre mot – LIBERTE ! Mon rêve s’accomplit : voguer sur le lac, le nez au vent avec un soleil chaleureux. Doux accueil du Baïkal !
A mi-parcours nous nous arrêtons au bord d’un cap. Je me demande pourquoi ? Une merveille à découvrir que je n’ai pas vu à l’œil nu ? Une surprise inattendue du lac ? Et je comprends vite…. La bouteille de vodka, les trois verres !!! Nous allons trinquer au Baïkal ! Mais en premier lieu, un rituel s’opère : on arrose ou baptise le lac et la grande mer pour la remercier de nous accueillir en son sein. On joint l’index et le pouce et on lance une goutte de vodka aux quatre points cardinaux : nord, sud, est, ouest du lac. Puis une goutte pour le Baïkal et hop on avale une gorgée de vodka ! Puis une autre ! Et on recommence le rituel ! On est bien en Russie, pas de doutes ! Et je retrouve bien les traditions russes et la vodka ! Je pétille de joie tout en admirant le paysage et le calme du lieu, face aux montagnes de la côte ouest, se couchant dans le lac. Tout du long, des plages de galets blanchissent la taïga verdoyante et la minéralité des roches. Un décor de désolation agrémentée parfois de forêts de pins ou d’arbres vivaces mauves échoués à cet endroit. On ne sait pourquoi ni comment. Des oiseaux, canards, eiders ou oies sauvages s’envolent et passent au-dessus de nos têtes, en criant très fort ! Ils sont trop bruyants ! Ils dérangent la quiétude des lieux.
« Dans le dictionnaire des symboles, on apprend que les canards, chez les Japonais, sont le symbole de l’amour et de la fidélité. Les cèdres dont je suis flanqué, eux, représentent la virginité et la pureté dans l’ésotérisme européen. Ce séjour est placé sous les auspices de la vertu. » Sylvain Tesson
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