Je pense, pendant le séjour en Mongolie, avoir passé, à peu près toutes mes nuits dans une yourte, dans la steppe mongole, sous une voûte céleste dantesque, cinglée par le vent, sous la pluie violente, prenant parfois la pluie dégoulinante, avec les yaks qui venaient se frotter ou brouter le long de la yourte… Toute une vie de nomade en trente jours ! Et j’en ai pour une vie et plus encore en ayant accompli ce rituel !
Mais il y a du plaisir à dormir en pleine nature, abrité par la yourte, avec le poêle ronflant à côté de vous, qui réchauffe la pièce, vos os et enlève l’humidité du matin ou du soir.
En général la yourte n’est jamais esseulée dans les steppes – elles par trois ou quatre. Dans les camps de nomades beaucoup plus. Et parfois on se sent oppressé lorsqu’il y a trop de yourtes. L’infinitude de la steppe mongole rend sauvage et donne envie d’avoir son intimité, son espace, sa vue grandiose sur les monts ou les dunes ou tout type de paysage devant soi. C’est en quoi la yourte est un vrai paradis.
On la nomme « Ger » en mongol.
C’est un habitat traditionnel des nomades qui peuvent la déplacer quand ils veulent. Et je vous raconterais plus loin comment cela peut se passer. Il y a plusieurs méthodes.
Mais avant tout je vais vous décrire une yourte. Elle a une ossature démontable en bois recouverte de feutre pour protéger du froid, de la pluie, du vent et de la neige. Car le temps est changeant en Mongolie. Tout soleil ou bien tout orage avec des vents violents en un rien de temps.
Les yourtes sont faites de murs en treillis de bois orange (Khana). En général elle en a cinq pour un diamètre de 5,80 mètres, une hauteur de 2,30 mètres. Le nombre de murs détermine la taille de la yourte qui peut aller de 15 à 120 m2. Nous nous avons connu que les 15m2 et cela suffit amplement!
Il y a une porte (Xalag) et une couronne, sorte de voûte (Toono) formée de 81 perches de bois peintes en orange (Hunnu) qui forme la charpente de la yourte. Ces hunnu peints, en couleur orange rayonnent comme un soleil réchauffant et éclairant la yourte. Ils symbolisent le bonheur dans la famille. Ces hunnu peuvent être aussi décorés des dessins chatoyants traditionnels mongols. Ces piliers sont emboités entre le cadre du toit et les murs. Cette voûte est soutenue par deux piliers (bagana) plus ou moins travaillé voire sculptée selon les yourtes. On dirait une ombrelle chinoise dont les armatures en bois sont dépliées et déployées pour soutenir la charpente de la yourte. C’est très délicat et splendide. On les leste souvent d’une pierre lourde, d’un seau rempli d’eau ou de pierre, pour éviter que le vent n’emporte le tonoo lorsqu’il est trop violent.
Les murs sont dépliés et attachés ensemble pour former un rond. On met alors la porte. Elle est attachée aux treillis par des sangles en crin de chevaux ou de yaks. Sur cette charpente on glisse une ou deux couches de feutres selon la saison (que l’on doit vénérer car les anciens ont vécu dedans et leur esprit est toujours là) (esgui) et une toile en coton imperméable blanc ou décorée qui recouvre le tout. On fait la même chose pour les murs. Les feutres sont attachés à l’extérieur avec des sangles en crin de cheval tressé. Le feutre a la propriété de garder la chaleur, de protéger du froid et du chaud – isolation thermique incroyable!
C’est une habitation pour toute une famille et quand je dis famille j’entends parents, enfants, grands-parents à minima.
C’est une grande pièce ronde, dont les murs intérieurs sont recouverts de tissus colorés, avec au centre un poêle. Sur ce poêle on y fait la cuisine, on chauffe l’intérieur de la yourte. On s’y réchauffe quand il fait froid. Le plus souvent, ce poêle est allumé le matin pour enlever l’humidité et pour préparer le repas. Le soir identique. Dans la journée, le temps en été, en Mongolie, n’oblige pas à allumer le poêle. A côté du poêle on trouve une grande pince et un panier avec le bois pour allumer le feu et le maintenir en vie. Et parfois un petit chalumeau pour gagner du temps à l’allumage.
Le sol est souvent composé d’un plancher de plastique pour éviter de marcher sur l’herbe de la steppe, pour isoler du froid et de l’humidité.
Dans la seule pièce arrondie, on trouve plusieurs lits qui dans la journée servent de sièges ou canapés chez nous. Les lits sont décorés des motifs mongols sur des fonds orange. Des tapis peuvent être posés sur les lits pour en adoucir leur dureté. Des tapis peuvent être déposés sur le plancher et sur les murs pour rendre la yourte plus agréable. Le lit à l’opposé de la porte d’entrée est celui du chef de famille. Il y a une commode, une table basse et des petits tabourets qui font face à la porte, souvent de l’autre côté des poteaux centraux. Parfois les nomades ornent les murs de la yourte avec des photographies d’animaux, de paysages pour la rendre plus attractive.
Les décorations des motifs mongols sont des nœuds sans fin ou éternel, symbole du bonheur et de l’éternité. On le trouve très souvent sur la porte de la yourte. Le motif en corne est le symbole de la richesse et du lien de vie. Il est très utilisé dans la décoration. Le chariot de la reine symbolise l’amour, l’invincible et l’honnêteté. On peut voir aussi des cœurs emboités les uns dans les autres et des fleurs de toutes les couleurs. Tout ceci est relié à la nature, à l’infini de la steppe mongole et le lien qui attache les nomades à cette vie et à leur famille.
La seule ouverture est la porte d’entrée qui est souvent très ornée, surtout à l’extérieur. Elle doit faire face au sud, en direction du soleil. Le sud ayant aussi comme symbole de faire face aux ennemis, les peuples du sud, rivaux historiques des mongols, depuis des siècles.
La porte ouvre sur la nature et tous les jours on peut apprécier d’ouvrir la porte et d’avoir un paysage incroyable, devant soi, se dérouler de jour comme de nuit : soit les chameaux couchés avec les dunes du désert de Gobi ; ou les chameaux partant avec des touristes en promenade ; les dunes qui changent de couleurs selon le nombre de nuages dans le ciel ; les monts verdoyants arrondis et tendres comme la poitrine d’une femme ; les rochers qui sont pléthoriques en Mongolie comme si la terre avait été retournée ; les orages avec les éclairs qui claquent sur les dunes ou la montagne ; les couchers de soleil rougeoyants ; la pluie qui tombe ou bien la grêle qui parsème le sol de blanc en plein été ; les chevaux qui galopent et s’ébrouent dans les steppes et ses pâturages ; les yaks qui broutent l’herbe et font un bruit du tonnerre ; et les vaches qui passent la tête pour vous dire bonsoir et entreraient bien volontiers vous faire un bec ; ou la chèvre qui joue au chien et vient jouer avec vous ; la moto postée devant la porte – gage de liberté ; le souslik qui bondit, se redresse, animal, mi- écureuil mi- souris, qui vient goûter les pommes déposées sur le sol ; ou les hommes qui se postent devant la porte et vous regarde comme si vous étiez un extra-terrestre sorti de nulle part ; ou les enfants qui viennent vous solliciter pour jouer au foot ou juste rigoler avec vous ; ou tout simplement la nature et les cieux qui changent d’heure en heure. Un spectacle, en soi, rétrécit et limité à l’encadrement de la porte de la yourte. La vie de nomade en un mot ! Mais quelle vie ! Tout passe et se raconte à travers cette porte !
A la gauche de la porte d’entrée on trouve souvent un petit meuble avec un lavabo et une petite réserve d’eau pour se laver les mains en entrant dans la yourte. « A l’entrée (…), il y avait accroché l’outre en peau de yak pour le lait de jument, ainsi que les écumoires et les tamis pour le travail du lait et la fermentation de l’aïrak. » Les temps sauvages de Ian Mamook
Quand il fait chaud on remonte les bords des toiles, tenus par des buches, pour laisser passer l’air et rafraichir la yourte. Le vent alors s’engouffre dans les tissus et les fait onduler, le long du treillis, et permet d’avoir une forme d’air conditionné, très agréable. Ne pas oublier de refermer les bords de toile en cas de pluie, de vent, d’orage et le soir aussi. Sinon froid garanti!
La partie supérieure, entre les deux bagana, au centre de la yourte est ouverte vers le ciel, étant partiellement recouverte du feutre. On peut ainsi voir les étoiles et les magnifiques voies lactées, lorsque le ciel est bleuté. Mais en fait, cette ouverture permet d’évacuer les fumées du poêle et d’aérer la yourte. Ou bien d’illuminer de jour la yourte. Lorsqu’il pleut on se dépêche de fermer sinon on est arrosé! Et il fait vite froid !
La yourte est divisée en deux parties. Chaque emplacement a une importance et respecte la tradition : à l’ouest celle pour les hommes, à l’est celle pour les femmes. Chaque meuble et chaque objet est disposé pour ne pas offenser l’âme de ceux qui ont vécu ici. Les objets de valeurs ou de famille sont rangés dans des coffres au fond de la yourte. On y trouve souvent les photos de famille, les livres, les habits, deels … Mais aussi la télévision qui grâce aux panneaux solaires et aux antennes satellites a apporté la modernité!
La forme ronde de la yourte fait référence à la voûte céleste. Les piliers centraux symbolisent l’axe cosmique, la liaison entre le ciel et la terre. Le feu est placé au centre et s’inscrit dans la représentation de l’univers. La femme étant celle qui s’occupe du feu. Elle fait souvent référence au chamanisme et est le lien entre la nature, les esprits et le peuple mongol.
Comment déplacer une yourte
Plusieurs méthodes s’offrent à vous! Il faut à peu près trente minutes pour la démonter et la remonter.
La première façon est de la démonter entièrement et cela prend quelques heures. Il faut déshabiller la yourte comme un homme qui désire une femme le ferait : retirer la toile protectrice blanche, le feutre, puis la voûte, les 81 piliers, le bois circulaire et enfin le plancher. Tout est réparti sur les dos des yaks, bêtes de somme, s’il en est. On est alors prêt pour d’autres pâturages. On se réinstallera plus loin, là où l’herbe est plus verte et tendre.
Autre moyen : La soulever à une trentaine de personnes, en ayant bien avant retiré tous les meubles la composant. Et hop ! D’un seul homme et en même cadence, un premier pas, puis un deuxième. On voit alors la yourte, de bric et de broc, avec un air un peu penché, voire déstructuré, avancer lentement. Arrêt sur image et on recommence. Ceci pendant un certain temps jusqu’à la destination finale. Ça prend du temps et il ne faut pas la déplacer trop vite et loin. Le risque étant qu’elle se désarticule et que l’édifice s’écroule. Cela ne marche pas pour changer de pâturages!
La troisième version est : Il existe aussi des yourtes posée sur un immense chariot. Celle-ci est tirée par des bœufs. On évite de la démonter. C’est réservé aux grands de ce monde comme Gengis Khan par exemple.
Je n’ai pas vu cette dernière façon de faire mais la première et la deuxième oui. Et cela vaut le coup! Cela donne de jolis fou-rires.
Mongolie – Paris Aout 2018
Question technique : salle de bains ? Toilette ?
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Ds la nature ou bien un trou entouré de bois ou bien wc normaux … douche qd aménagée sinon gant et Brot eau sinon lingettes😊
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Mais tte la nature pour soi c’est magnifique !
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