Trouville à travers ses prismes


Se balader dans Trouville c’est comme reparcourir le monde des années trente, des années folles où Coco Chanel faisait ses débuts dans la mode ; où tout le monde venait à Deauville ou à Trouville pour se reposer dès 1936, après le Front Populaire, date des premières vacances accordées aux travailleurs.

Trouville est un musée à ciel ouvert et nous offre la joie de se peindre en affiches, en décors ou en photos de l’époque.

Alors partons à la récréation et la re-visitation de ce monde et surtout affranchissons nous de tous les tabous pour mirer cet art de la rue et de la vie tout court.

Levons les yeux au ciel, jetons nos regards sur le monde trouvillais qui s’ouvre à nous et vive la découverte de cet écrin ! Parcourons-le !

Tout commence par une descente des cent marches nous amenant sur le front de mer, sur les planches qui permettent de ne pas s’enfoncer dans le sable et d’apprécier le bord de mer. Mirer l’eau et les vagues permet de rentrer en soi et de se sentir lié à la mer, aux écumes, aux vagues, aux flux et reflux des éléments et de participer à la vie de la nature. La mer avec la force du vent dessine comme des arcs et des jets arrondis sur le sable fin. On dirait des coups de pinceaux lancés de la mer vers la ville créant des ressacs et des stries où le ciel peut miroiter.

La plage longue et large semble vide de monde et l’on se sent seul face à l’immensité. Le gris vert de la mer est imposant et vous gèle jusqu’aux os. Mais qu’à cela ne tienne nous continuons notre balade.

Passant dans l’impasse Marguerite Duras on croise la maison des Roches noires où cette dernière passa la fin de sa vie et où Proust s’installa à une certaine époque.

Le vent décoiffe et engourdit les doigts. Il rafraichit les idées et notre esprit ; et surtout il nous pousse vers la ville et la rue des bains. Mais pour rejoindre ce coin le vent nous donne l’agrément d’apercevoir de très jolies maisons. Ces dernières dans différents styles sont faites de briques rouges où sont intégrées des faïences colorées dans les bleus, verts comme pour nous rappeler que la nature faite de forêts, d’eau et de ciel est toujours présente. Des jardins offrent les premières oraisons de la saison du printemps avec les fleurs de pommiers ou de pruniers qui pointent leurs fleurs vers le ciel et le soleil. Des « pompons » blancs agitent leurs branches dans tous les sens, au gré de ce vent capricieux.

Aujourd’hui le ciel est lourd de nuages grisonnants qui se meuvent à la rapidité d’un goéland. La mer est verte d’eau voire grise-acier. On voit facilement l’horizon car il ne se mélange pas au ciel. Des cerfs-volants volent au-dessus de nos têtes, virevoltent et tournent. Ils finissent par se retourner et tomber à pic sur le sable au grand dam des enfants.

Une jolie maison attire mon regard : elle est rose bonbon et blanche et surplombe la baie cachée par des arbres déjà en feuilles. Elle est posée sur le haut de la colline et regarde Le Havre comme si elle était un phare posé là, qui surveille la baie, aide les bateaux et les porte-containers à ne pas se perdre, pour éviter de s’échouer sur les bancs tout en affrontant les vents mauvais qui sifflent parfois très forts.

Sur la plage des bancs bleus sont là et portent les noms de grands peintres, d’écrivains ou de gens connus. Eugène Boudin, Monet, Bonnard, Proust et tant d’autres… Aucune envie de m’y asseoir car cela serait salir le nom avec nos popotins ! On peut ainsi compter le nombre de bancs et le nombre de personnalités qui ont vécu ou vivent encore à Trouville.

Et puis Trouville et les parasols quand le soleil est là – c’est la marque de fabrique !

Les mouettes font Trouville aussi sur cette plage immense. Elles volent dans tous les sens et chapardent aux enfants inattentifs les gaufres ou les morceaux de pain. Elles ont l’œil agile et la démarche trompeuse des canards. Chapardeuses et rapides ces mouettes. Elles sont le symbole de Trouville que Savignac a croqué et il ne fait pas bon les croiser.

Puis passant devant le chalet Mozin et l’hôtel de La Plage on peut enfin tourner sur la rue des bains pour entrer dans les rues tarabiscotées du ventre de Trouville. Là s’offriront les images des dames en crinolines qui marchaient dans les années folles sur les planches de bois et dans les rues. On peut s’imaginer les fantômes de ces années qui parcourent ville, planches et sable, dans les reproductions qui ornent les murs des maisons.

Ce que j’aime dans cette ville ce sont ces maisons si hautes et si gracieuses, colorées et agrémentées de faïences toutes différentes les unes des autres. Des fers forgés magnifiques et originaux embellissent les fenêtres des maisons et parfois des vitraux remplissent les pièces d’une lumière tamisée. On peut alors admirer de l’extérieur ces incroyables beautés sans pourtant pouvoir en ressentir toute la réalité.

Et puis un autre plaisir est de lire et regarder les jolies affiches où l’on peut admirer les représentations et les coups de crayons que la « reine des plages » a pu donner à interpréter à ces affichistes. Ces derniers invitent le chaland à venir flâner sur ces côtes. Ils y vantent la mer, les piscines, le sable chaud blond et les jeux qui en découlent. Des pans de vie des années trente revivent sur certains murs. Et surtout Savignac le célèbre affichiste apporta à la ville un regain et un regard coquin. En particulier cette femme en maillot de bains rouge, aux seins pointés vers le soleil et le ciel, les jambes repliées avec une mouette sur les genoux qui jouit de la vie et du bonheur de bronzer en ces lieux. Une autre femme sortant de son bain de mer avec sa serviette de plage complètement soulevée par le vent nous rappelle les plaisirs de ce lieu et les joies que découvraient et découvrent toujours les nouveaux estivants. La mer est présente partout et à tous les recoins des rues tarabiscotées.

Proust est aussi en ces lieux et dans les rues sous les formes de madeleines de Proust. Et son visage si particulier orne à peu près toutes les boutiques de souvenirs ou de gourmandises ainsi que les fenêtres des maisons de pêcheurs. Car il y a du péché dans la madeleine !

Parfois sur des murs des papillons croisent des signes japonais ou chinois. Dans des boutiques on peut s’amuser à découvrir des chapeaux cloche orange sur des mannequins qui portent au cou des jolis colliers ornés de pierres ; ou bien de jolies robes nous tentent et des cœurs font des reliefs sur les vitres. Parfois j’ai pouffé de rire, en voyant la demande ironique d’un brocanteur, ayant à sa disposition une plaque de la marque Austin Cooper : « Je cherche le reste de la voiture » !   Offrons-lui ce bonheur et à nous aussi lorsque l’on sait qu’à Deauville des voitures de toutes les marques les plus chères et les plus m’as-tu-vus sont livrés à notre regard dans le parking du marché.

C’est tout cela Trouville. Et puis plus on monte à travers les escaliers, les ruelles et les passages plus on s’offre à nous une vue à 360 degrés sur la baie, la mer et les maisons. La beauté du paysage se fait là et vous renvoie son image de ville à l’histoire dorée et aux fastes des années trente.

Rêvons encore et toujours ! Parcourons le passé et réinventons une nouvelle image de Trouville.

 

Trouville, 28 avril 2019.

Catégories :Europe, France, Non classéTags:, , , , , , , , , , , ,

1 commentaire

  1. Beau reportage… j’avais tellement envie aujourd’hui avec ce beau ciel bleu sur l’Ile de France de voir la mer. Et pour nous, Trouville c’est le Deauville abordable des parisiens. J’aime ces villas d’une autre époque …. Merci bcp 😉

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