Le trail entre Ucluelet et Tofino – le wild Pacific trail


Une des balades magiques et inoubliables est celle du trail le long de la côte entre Ucluelet et Tofino. Un très bel itinéraire sur la côte partant du bout de la ville d’Ucluelet et longeant la côte jusqu’à la superbe plage du Black Rock Resort où les surfeurs viennent le temps de la saison pour s’éclater.

Il démarre par le phare Amphitrite à Ucluelet et longe la côte rocheuse, dentelée qui serpente à travers les falaises. Le rivage est escarpé, battu par le vent et toute la nature est prise en étau et se transforme au gré des alizées.

Phare très joli car il rappelle les tonnelles des jardins chinois, tout rouge, surplombant la côte et seul rappel pour les bateaux perdus dans les environs.

Lorsque l’on décide de marcher de là tout le long on passe par des virages, des crochets, et on finit par atterrir sur la plage de l’hôtel Black Rock Resort, lui-même accroché à un piton rocheux, qui domine ce coin du trail.

Les vagues, lorsque la marée monte, tapent les roches, se fracassent dessus, font des bonds de dix mètres et crachent une écume qui envahit tout. Le bruit des vagues est effrayant par moment et le vacarme recouvre toute vie. Les vagues se transforment en rouleaux tant aimés des surfeurs qui peuvent se glisser entre. On dirait que la tempête est permanente et transforme la nature, la modèle et modélise à coup de lampées d’eau. Elle arrache des cris de douleur des rochers et travaille la côte à son gré et fantaisies.

Lorsque l’on rejoint la plage rocheuse de l’hôtel Black Rock Resort, on découvre à marée basse tout un écosystème impressionnant de beauté. Les mousses vertes tapissent les pourtours des rochers – juste le reflet des algues vertes recouvrant le sol et parfois des herbes folles, vertes, un peu grasses se relèvent pour respirer et batifoler. Les rochers se font pointus et menaçants pour nos pauvres pieds. Les fleurs poussent le long de la côte. Elles ont des pistils au contour jaune arrondi sur des pétales rouges. La tige est fine et brinquebalent dans les tous sens que le vent imprime. Je n’avais jamais vu d’aussi ravissantes fleurs si bien dessinées, si colorées et d’une pureté édifiante. Les iris jaunes étaient parsemées un peu partout, plantés dans les herbes grasses, rendant le paysage tout jaune et printanier. Leur cœur était tout ouvert et on distinguait bien les pistils complètement offerts au ciel. La côte offrait un paysage verdoyant empli de vase verdâtre encerclé de sel – dépôt de la mer séchant au soleil et à l’air. De grandes herbes avec des boutons d’or remuaient au gré du vent et de la folie des alizées. On aurait dit un spectacle lunaire contrastant avec le noir volcanique des roches. Par ci par là des algues accrochées aux roches se détachaient et apparaissaient sur notre chemin. Là aussi les couleurs contrastaient avec le reste entre le marron, le jaune ou le rouge. Certaines dessinaient comme des pustules aux bouts jaunâtres et donnaient l’impression d’une peinture à ciel ouvert.

Continuant le chemin on traversait des rigoles, évitant de mettre les pieds dedans et on apercevait des langues de mer enfermées derrière les roches. Le ciel se reflétait dedans et à proximité, des pins tendaient leurs branches vers le ciel comme pour s’y encrer. La mer par endroit s’était laissée enfermée et nous offrait au regard, un petit lac paisible, alors que de l’autre côté des rochers, la mer rugissait et se fracassait, entrainant l’érosion de la nature. On faisait aussi des rencontres incroyables comme ce morceau de bois tout gris, rongé par les vagues et l’écume qui trônait comme une tête d’animal abandonné en cet endroit. Les arbres avaient leurs troncs tout tordus, faisant des circonflexes à l’envers, comme un pommeau arrondi d’une canne. Impressionnant de voir ce tronc tout incurvé ! Et puis au gré de la balade, de hauts roseaux faisaient surface et se dandinaient, tanguaient entre les rochers. On aurait pu se croire en Bretagne sur la côte nord. Mais non, nous étions bien sur l’île de Vancouver, sur la côte pacifique. Les arbres avaient aussi leurs racines tordues accrochées aux rochers et se miraient au coucher du soleil dans ses rayons dardant la côte. Par endroit, des troncs d’arbres faisaient surface, recrachés par la mer. Ils tapissaient un recoin vert, entre des sapins, bouchant un estuaire de la plage. Et puis tout à coup on se trouvait nez à nez avec un wapiti dégustant ses herbes favorites, salées, le moins du monde effrayé par votre présence, continuant à croquer ses fleurs délicieuses. Tranquillement le wapiti suivait son chemin ignorant votre passage.

Le lendemain j’ai repris le chemin le long de la côte me dirigeant vers Tofino. Et là la nature et les arbres étaient encore plus étranges. Droits comme des « i », les pins étaient accrochés à la roche ; des cèdres, arbres immenses de la forêt pluviale, s’élancent vers le ciel avec leurs plumeaux en guise de feuillage. On dirait des têtes échevelées qui vous regardent et vous toisent de leur hauteur. On retrouve aussi les lichens qui font des doigts crochus cherchant à vous toucher ou vous happer. Des grandes plantes grasses au vert printemps se cachent souvent sous les racines des arbres et des espèces de mini pins verts de vingt centimètres de hauteur – sorte de plante grasse – parsèment le chemin. A eux seuls on dirait avoir affaire à une forêt miniature vert pomme. Comme dans Cathedral Grove beaucoup d’arbres sont couchés, d’autres ont le tronc déformé comme une vague en forme d’autruche au cou tordu, immense, élancé vers le ciel. Impressionnant comme la nature peut se déformer et s’adapter. D’autres ont formé des excroissances qui forment une sorte de nid pour aigle – hélas bien trop bas pour les abriter, le tout recouvert d’une mousse verte qui pend. On pourrait presque s’y coucher ou bien s’en faire un nid douillet ou une balançoire statique.

Tout au long du chemin lui-même tortueux des passants ont créé des cairns en bois où chacun vient ajouter sa pierre ou son galet, à l’édifice branlant et risquant de tomber à tout moment et à chaque rage du vent. Ainsi l’homme laisse son empreinte spirituelle.

On y admire des paysages plus beaux les uns que les autres où la mer vient lécher les roches ou bien les griffer, les laminer pour les détruire.

Et puis vient le moment où l’on se retrouve face à une immense plage de sable fin blond voire marron. Long Beach. On dirait la Baule mais cinq fois plus grande. Des monts sont plantés par ci par là enserrant la plage de sable et créant avec le remous des vagues, des stries dans le sable. Des rochers recouverts d’herbes rases et de pins se faisaient face rendant le spectacle magique. Le soleil caché derrière les arbres rendait la plage miroitante et dantesque. Le ciel moutonnait et le soleil dardait la plage de ses rayons. De longues vagues roulent sur la plage, créant des rouleaux où les surfeurs peuvent s’engouffrer. Mais là les flots étaient trop bas pour s’y lancer ! Avec le coucher de soleil le sable devenait brillant et luisait. Les nuages se jouaient du soleil et créaient comme une boule de feu. Mais en fait une boule de nuages enrobant le soleil qui redoublait de son feu.

Une seule envie : marcher, arpenter cette plage, s’asseoir et regarder le paysage pour l’inscrire à jamais dans sa mémoire. Respirer, inspirer, humer et se recentrer sur la nature. Profiter de ce paysage et en imprimer la beauté dans chaque pore de sa peau. Ne rien oublier et se recueillir en ce lieu improbable. Un lieu habité par la nature et les esprits.

Ucluelet, mai 2019.

 

Catégories :Amérique du Nord, Canada, Non classéTags:, , , , , , ,

1 commentaire

  1. Le recueillement et l’introspection, c’est ce que je recherche aussi dans la marche… Merci pour ce partage !

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