Parmi les sites les plus improbables et les plus tristes pour moi – ce dernier, le monastère de Onguiin Khiid en fait partie. Lieu où toute spiritualité a été détruite, ruinée par les communistes et où aucune sensation n’est plus possible. Un moment de grande tristesse !
Pour l’atteindre on passe par des routes magnifiquement sèches et granulées de caillasses, à part l’endroit où nous nous étions arrêtés pour déjeuner.
Une rivière tournoyait et ses méandres laissaient la possibilité de se rafraîchir. Ce que j’ai fait naturellement – tremper mes jambes dans une eau fraiche ! L’eau était couleur acier et aussi glaciale que sa couleur ! Le contraste était fort entre la chaleur ambiante et la froideur de la rivière. Le courant était fort et il fallait faire attention à ne pas glisser sur les herbes ni tomber. Il faisait la joie des oiseaux en particulier des buses ou aigles qui se cachaient dans les hautes herbes beiges, sèches et dures comme des piquants.
Après cet intermède de fraicheur, nous avons rejoint le désert de granit rose avec des collines plus ou moins rudes et dentelées comme des lames de couteau bien affutées.
Et nous sommes enfin arrivés dans une zone montagneuse de roches basaltiques, faisait office de paysage. La montagne de Delger Hangaï où seule la rivière Onguii avait un cours joyeux et frais.
Nulle envie de rester, de se poser ou de flâner ni de dormir dans une yourte. Tristesse à mourir dans un cadre asséché !
Parfois on se demande pourquoi les moines choisissent de s’installer dans des sites aussi hostiles.
Nous nous sommes arrêtés devant l’endroit où trônait une porte immense en bois rouge prévenant que nous étions devant un monastère. Nul n’aurait pu le deviner tellement l’endroit était vide.
On retrouvait sur les portes les signes distinctifs du bouddhisme : la svastika pour le bonheur ; la conque symbole du son du dharma luttant contre l’ignorance ; le lotus symbole de pureté et le vase élixir d’immortalité de la vie. Et en hauteur des têtes d’éléphants blancs – dignes représentants de la puissance de Bouddha – avec des fleurs rouges entourant leurs têtes, faisait honneur aux touristes qui passaient mais surtout aux pèlerins et aux moines qui venaient se recueillir sur ce site.
Les alentours sont vraiment très hostiles : déserts en vue de tous les côtés, sable fin jaune et pierres coupantes. Quelques touffes de verdure, survivantes de ce désert et arrosée par les pluies diluviennes ou les nappes phréatiques s’échappant de la rivière. Seul un méandre de la rivière Onguii apportait un peu de fraicheur dans un endroit où la chaleur plombait l’envie de vous y promener.
Plus vous avanciez dans le monastère détruit, dont restent seules des pierres et les bas des murs des habitations des moines, plus vous sentiez la pesanteur vous assaillir et moins l’envie de visiter vous prenait. Votre gorge se serrait et une envie de faire demi-tour vous enveloppait.
Ce site fut pourtant un très grand lieu de spiritualité en Mongolie : un millier de lamas ! En 1937 les purges des communistes firent 200 morts parmi les moines, des déportations entre autre. Tout est désolation sur ce site et on ne peut imaginer que ce lieu fut si important pour la religion bouddhiste en Mongolie. Tout est resté comme après le carnage réalisé par les purges : bâtiments démolis, ruines, murs effondrés, pierres partout, pans de murs restants. En un mot un lieu de miséricorde et de tristesse profonde. Mais pas de spiritualité !
Seul un chorten redonne vie et nomme les moines qui ont été tués sur place (200 au moins).
En 1990 le lieu a été réinvestit par une petite communauté religieuse qui a bâti un petit temple en 2004 et a récupéré les maigres trésors restants qui avaient été protégés au moment de la destruction. Une yourte abrite les trophées sauvés des purges et deux moines vivent ici. Mais hélas pas en permanence. Ce qui rend encore plus désespérant ce lieu.
Seul le ciel bleu était clément avec ses nuages qui comme des mains ou des anges auréolaient le monastère reconstruit.
Je suis sortie de là comme éprouvée, triste et profondément révoltée par ce lieu détruit, sans âme !
Nous avons filé vers notre campement et là ce fut un moment de joie et de repos. Comme après ne bataille !
Le camp à flan d’une colline et surtout le long de la rivière Onguii qui faisaient des méandres dans le paysage désolé. En face de nous l’aridité et un brin de verdure où venaient manger les vaches. Quelques arbres protégeaient la rivière le long des dunes de basalte. Le vent s’est levé pour finir par un orage pendant la nuit.
Et en soirée, vers 19h, le festival de lumières s’est installé sur la vallée de l’Onguii. Le ciel s’est recouvert d’un film grisâtre, blanc, avec des rayures plus ou moins foncées. Et puis à travers des trouées, le soleil a joué à venir, repartir, réapparaitre pour être encore plus fort et rayonnant. La terre s’est rosacée, les herbes sont devenues plus vertes et le vent a augmenté sa violence. Puis petit à petit le ciel est devenu orange pâle se reflétant dans la rivière. La rivière étincelait de doré, de jaune pâle, d’orange et de rouge flamboyant. Le coucher de soleil s’est caché derrière les montagnes. Puis il s’est affaissé pour briller sur les monts et recouvrir d’orange toute le paysage s’offrant à nous. Le bleu du ciel est réapparu se faufilant entre les interstices orange laissés par le soleil. Et toute la soirée le soleil s’est joué du ciel, des nuages et a coloré la vallée de rose, d’orange, de rouge, de mauve. Une féérie flamboyante de couleurs et de reflets !
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